Et c’est reparti pour de grands travaux à l’église saint-Ignace à Paris ! Avec le soutien de la Fondation de Montcheuil, un vaste chantier de rénovation a été entamé pour 8 mois.

Il ne s’agit pas seulement de travaux d’entretien, mais de l’achèvement du réaménagement liturgique et surtout d’une occasion unique pour créer une œuvre d’art de lumière monumentale. Nous découvrirons les premiers éclats de cette œuvre lumineuse en septembre 2017. Cette chronique raconte le processus de création de ce projet hors-norme. Comment un artiste d’aujourd’hui va nous aider à parler d’un Dieu qui nous libère aujourd’hui ?

Une église et une histoire

L’église des Jésuites à Paris, Saint-Ignace a eu plusieurs missions ; on peut même dire plusieurs vies. Les pères jésuites s’installent dès 1821 rue de Sèvres et construisent leur résidence autour d’une cour intérieure. Le chantier de l’église commence en 1855 sur les plans d’un architecte jésuite, le Père Magloire Tournesac. Par souci de discrétion à une époque où le ministre des Cultes appréciait peu la Compagnie de Jésus, la façade est en retrait derrière les maisons rue de Sèvres. Un important travail pastoral rayonne à partir de cette résidence. Notons que 5 pères jésuites massacrés lors des événements de la Commune en 1871 sont enterrés dans une chapelle latérale. Entre 1880 et 1923, les jésuites sont expulsés 2 fois de cette église. À leur retour, ils reçoivent comme mission de s’occuper des catholiques étrangers résidant à Paris.

L’église de la rue de Sèvres devient alors l’Église des Étrangers, jusqu’en 1961. Depuis, tournée vers l’accompagnement des personnes à la manière Jésuite, elle se nomme église Saint-Ignace. La recherche liturgique précédant le Concile Vatican II s’y déploie très tôt avec des expérimentations de célébration en français face au peuple. En 1972, tous les anciens bâtiments de la résidence sont démolis pour accueillir le Centre Sèvres, l’Institut supérieur de Théologie et de Philosophie de la Compagnie de Jésus avec une bibliothèque considérable en provenance du théologat de Lyon. Cette bibliothèque est installée dans l’espace autour de l’église. Sous les vitraux, derrière le triforium, 300 000 ouvrages enveloppent ce lieu de prière.

Les débuts d’une réforme de l’espace liturgique 

Aujourd’hui, elle n’est toujours pas achevée. La constitution du Concile Vatican II sur la sainte Liturgie insiste sur la participation des fidèles et sur l’aspect communautaire de la célébration. La grandeur longueur de la nef ne convient plus : le P. Jean-Marc Furnon sj, chapelain à l’époque, anime cette mutation en faisant appel à des architectes expérimentés en aménagement liturgique : Jean-Marie Duthilleul, Étienne Tricaud et Benoît Ferré. Désormais, l’autel, l’ambon et le siège de présidence sont installés au centre d’une ellipse formée pas l’assemblée. Le chœur est séparé de la neuf par des claustras et devient le lieu de la prière d’adoration.

Ces changements puissants se sont inscrits dans un espace architectural néo-gothique allongé, de grande hauteur (27 mètres !) tandis que les chapelles de dévotions latérales sont remises en valeurs par une restauration des fresques. Ce chantier n’est pas fini : le chœur, séparé par 3 marches et une claustra de bois n’a pas encore été aménagé de manière aboutie. Et le lien entre l’ellipse de la célébration communautaire et ce lieu de prière personnelle est à appuyer : une pente douce réunira les 2 espaces et les marches seront transformées en gradins vers l’autel. De plus, après 160 ans, les murs ont besoin d’un nettoyage pour redonner à la pierre sa luminosité originale. L’éclairage sera donc repensé. L’ensemble de l’église rayonnera d’une lumière nouvelle !

Un « projet lumière »

L’histoire du lieu nous laisse un triforium aveugle tout autour de la nef et du chœur. Nous avons compté : il y a 52 fenêtres, comme les 52 semaines d’une année liturgique, c’est-à-dire le parcours que nous recommençons comme chrétien, année après année. Le P. Tournesac connaissait ses classiques !  Ne pourrait-on pas profiter de ces 52 surfaces de 3x1m pour une mise en lumière originale, véritable œuvre d’art qui parlerait au cœur de tous les fidèles et des pèlerins de l’action d’un Dieu qui nous accompagne dans nos vies ? Jean-Marie Duthilleul nous proposa de travailler avec Patrick Rimoux, sculpteur lumière, capable de faire danser les façades de la Grand-Place de Bruxelles par un travail minutieux d’éclairage LED et d’autres outils. Depuis septembre 2016, nous avons intitulé ce travail « le projet lumière ». Une première phase s’achèvera cet été avec l’installation de 6 fenêtres. Rapidement, les Exercices Spirituels de Saint Ignace de Loyola, trésor des jésuites, sont apparus comme le thème de cette œuvre d’art lumineuse, originale et novatrice.

Des premières rencontres à l’installation, cette chronique souhaite montrer le travail de collaboration riche et exigeant qui se cache derrière ce projet hors-norme par ses dimensions (un triforium complet), son ambition (aider à entrer dans l’expérience des Exercices Spirituels pour chercher et trouver Dieu) et ses moyens originaux (la sculpture de la lumière).

Jean Berger, sj, Scolastique jésuite, étudiant en philosophie et théologie

> Source : revue Narthex / photo : © Aurélie Arff

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